Atelier : Sons Seuls (2010)
Atelier préparé par : Frédéric DUBOIS
aidé de : Julien Bourgon et Pierre Antoine Coutant
L'objectif de cet atelier est de :
Présenter un état des lieux au sujet de cette matière indispensable à l'élaboration des bandes sonores de films, qui d'année en année se tarit.
Provoquer des rencontres entre les différents métiers de la production et de la postproduction.
Etablir un document résultant de cette réflexion. Ce document est une « Recommandation » de l'AFSI et non pas une injonction de « ce qu'il faut faire ou de ce qu'il ne faut pas faire », car nous nous devons de bien garder à l'esprit que chaque film est unique et que l'adaptation à la situation est la seule règle à respecter.
Organisation de l'atelier :
Session A : Qu'est ce que l'on entend par « Son Seul » ?
Définition claire de la notion de Sons Seuls.
Les familles de Sons Seuls.
Les dénominations des Sons Seuls.
Les changements depuis l'apparition des systèmes de montage virtuels.
Les avantages des Sons Seuls.
Session B : La Prise de Son.
Difficultés et contraintes sur le plateau de tournage.
Les formats d'enregistrement.
Les fréquences d'échantillonnage.
La quantification.
Quels sont les formats les plus adaptés à la postproduction ?
Faut-il engager prématurément le Monteur Son pour l'enregistrement des Sons Seuls ?
Session C : Le Montage Son.
Difficultés et contraintes des Monteurs Son.
Traitements et nettoyage des sons
Différentes propositions pour l'enregistrement des Sons Seuls en tournage.
Proposition d'une liste de généralités.
Session D : Les Sonothèques.
Est-ce que les Sons Seuls du tournage peuvent couvrir tous les besoins d'un film ?
Pourquoi la sonothèque est-elle indispensable ?
Pourquoi les sonothèques professionnelles françaises ont-elles pratiquement disparu ?
Qui sont les propriétaires des Sons Seuls ?
Pourquoi certains ayants droit considèrent-ils que l'on a eu affaire à un véritable « Piratage » de leurs sons seuls ?
Que penser des sonothèques en ligne sur internet ?
Session A
Qu'est ce que l'on entend par « Son Seul » ?
On considère comme « Son Seul » tout enregistrement destiné à l'élaboration de la bande sonore d'un programme audiovisuel non associé à la prise de son directe et synchrone.
La postsynchronisation et généralement la musique ne rentrent pas dans cette catégorie.
Un Son Seul est par essence non synchrone, mais comme toute règle qui se respecte il y a des exceptions.
Certains enregistrements synchrones peuvent être désynchronisés et deviennent de fait de potentiels Sons Seuls. Exemple : plans sur une foule lors d'un match de football.
D'autres Sons Seuls sont dits « asynchrones ». Ce sont des enregistrements qui sont constitués de plus de trois événements simultanés et de même nature. Au-delà de cette limite de trois, le cerveau ne peut pas faire correctement la relation de synchronisme entre l'image et le son.
Les Sons Seuls servent d'une part à compléter la narration du programme audiovisuel et d'autre part à l'élaboration de la version internationale.
La famille des Sons Seuls se divise en 5 catégories :
1- Les Sons Seuls Texte. Ils se divisent en deux sous catégories.
- Les raccords Texte dits « In », ou « Rustines ». Ils sont souvent enregistrés sur le plateau de tournage, juste après une prise, pour éviter une postsynchronisation future.
- Les Textes dits « Off » ou « hors champ ». Enregistrés pendant ou après le tournage, mais n'entrant pas dans la catégorie de la postsynchronisation.
2- Les « Fonds », Ambiances ou Silences Raccord.
Ces enregistrements permettent de faire raccorder les prises de « son direct » avec les postsynchronisations. Généralement, les ambiances Raccord sont enregistrées avec le même dispositif que celui utilisé pour la captation du direct.
3- Les Ambiances.
On admet comme ambiance un enregistrement en plan moyen ou en plan large d'une composition d'événements sonores associés au décor de la scène.
Exemple : une circulation sur la place de la Concorde à 8 heures du matin.
4- Les Effets.
On admet comme effet l'enregistrement d'un événement sonore associé à l'action.
Exemple : le passage d'une voiture.
5- Les IRs ou « Impulse Responses ».
L'IR est l'enregistrement de « l'empreinte acoustique » d'un lieu ou d'un objet. Cette empreinte permettra ultérieurement, grâce à un algorithme basé sur la convolution, d'être utilisée en tant que réverbération. Concrètement, l'enregistrement d'une IR dans un décor permet lors du mixage de faire raccorder au mieux les postsynchronisations avec les directs puisque l'acoustique du lieu est parfaitement émulée par le logiciel de réverbération à convolution. Toutefois, l'IR peut être enregistrée à des fins esthétiques.
Exemple : L'acoustique de la cathédrale de Chartres.
Sur un rapport son, la dénomination d'un Son Seul est toujours précédée d'un 0.
- Un « 0 » suivi d'un numéro de séquence ou d'un plan indique que le Son Seul est soit un effet, soit un fond raccord, soit un Son Seul texte.
- Un « 00 » suivi d'un numéro de séquence ou d'un plan indique que le Son Seul est une ambiance.
- Dans l'entête d'un fichier numérique au format .bwf, c'est-à-dire la zone des « métadonnées », c'est la lettre W qui indique qu'il s'agit d'un Son Seul sans toutefois mentionner la nature du son (ambiance, effet, etc.). Les changements depuis l'apparition des systèmes de montage virtuels.
Avant l'apparition des systèmes de montage virtuel et la multiplication des canaux de diffusion en salle de cinéma ou à la télévision, le Chef Opérateur du Son fournissait des sons qui raccordaient le plus possible à une scène ou à une action donnée.
Les films étaient produits en 16 mm ou en 35 mm, les montages son comportaient environ 16 pistes sur support magnétique. Chaque modification de montage était lourde à gérer surtout lors de l'étape du mixage.
Maintenant, les changements de montage image peuvent intervenir jusqu'au dernier jour du mixage. De ce fait le montage son doit être ventilé sur de nombreuses pistes et il en est de même pour les consoles de mixage.
Pour avoir cette grande marge de manoeuvre, les Sons Seuls doivent être les plus isolés ou les plus précis possible.
Voici un exemple d’un Son Seul de très bonne facture technique, mais malheureusement inexploitable.
En effet, il comporte trop d’effets différents et précis, tout ceci en gros plan, ce qui empêche son montage dans une séquence.
C’est l’enregistrement d’un fourgon de police au ralenti avec l’ouverture de la porte coulissante, la descente des policiers et les déclenchements d’appareils photographiques.
Sortie fourgon appareils photos mono : 40 secondes :
Il y a des situations ou l'enregistrement de Sons Seuls est plus efficace que la reconstitution systématique des éléments en postproduction.
Exemples :
1- Les foules (cafés, concerts, stades) :
Avantage : Le nombre de comédiens, l'acoustique du lieu.
Inconvénient : Petite mise en scène à prévoir, aide du 1er assistant Réalisateur, 15 minutes à prévoir sur la journée de travail.
2- Les Cascades :
Avantage : Tous les événements sonores synchrones sont enregistrés et servent de base solide et exploitable au montage son.
Inconvénient : Nécessite une préparation de placement de microphones.
3- Les Enfants en groupe (école, jeux, bagarre) :
Avantage : Naturel des enfants difficile à reconstituer en postsynchronisation.
Inconvénient : Petite mise en scène à prévoir, aide du 1er assistant Réalisateur, 30 minutes à prévoir sur la journée de travail.
4- Les chevaux en groupe :
Avantage : Le naturel, la masse, la sonorité
Inconvénient : Logistique un peu plus lourde qu'avec des véhicules à moteur.
5- Les récurrences des séries télévisées :
Avantage : Une vraie charte sonore relative aux décors et aux personnages.
Inconvénient : Gestion d'une sonothèque à établir.
Session B
La Prise de Son
A- Difficultés et contraintes sur le plateau de tournage.
On ne peut pas dissocier le son d'un film avec son époque, désormais on n'enregistre plus le passage d'une voiture avec un M160 et un Nagra 4.2. L'esthétique a changé. La diffusion multicanal est apparue et de ce fait l'espace sonore à gérer est plus large qu'avant.
La pollution sonore est plus envahissante à la fois « sur et hors » plateau de tournage et malgré l'évolution technologique, il est très difficile d'éliminer une ventilation de caméra numérique ou de ballast à alimentation à découpage.
Mais il ne faut pas oublier le plus important c'est-à-dire la considération que porte la réalisation sur l'utilité des Sons Seuls non synchrones, et du temps imparti à leur enregistrement lors des tournages.
Il en ressort qu'en général, la méconnaissance profonde de l'utilité de ces Sons Seuls, ou alors, la pression du plan de travail génère un désintérêt général, qui se solde la plupart du temps, par un ajournement systématique.
Ceci est d'autant plus vrai que la tendance actuelle a pour leitmotiv :
« n'est considéré comme sonore que le texte ».
Ce qui rend ce travail quelque peu expéditif.
Les plus anciens dans le métier ont fait part de la manière dont se passaient les choses.
Il n'y a pas si longtemps encore, les Chefs Opérateurs du Son, prenaient du temps sur leurs heures de pause repas pour enregistrer les Sons Seuls. Aujourd'hui, il semblerait que cette pratique soit en perte de vitesse devant le nombre croissant de sons à effectuer, dus à l'avancée technologique à laquelle nous faisons face. En effet, le format d'écoute multicanal contraint le Chef Opérateur du Son à devoir fournir une grande quantité de sons, indépendamment des cinq catégories que nous avons définies lors de la session A. Il y a aussi des difficultés liées au fait que d'autres corps de métier déjeunant plus tôt profitent de cette plage horaire, afin d'effectuer des travaux ou des préparations pour les séquences à suivre. Dans ce cas, le silence est très difficile à obtenir, voir impossible.
La question de l'enregistrement des répétions se pose aussi, en ce sens qu'il a été pratiqué par certains d'entre nous, et peut parfois apporter son lot de satisfactions si tant est, que le réalisateur ne s'y oppose pas, que l'équipe joue le jeu et que les comédiens se donnent comme pour la prise. Cette pratique a prouvé son efficacité dans certaines situations, notamment dans le tournage de séquences avec des enfants en bas âge. Il est aussi possible d'en extraire des Sons Seuls utilisables par la suite en postproduction. Il est bon de souligner aussi que les répétitions enregistrées offrent l'avantage d'une ambiance de travail bien plus sereine que d'ordinaire.
En résumé, les contraintes rencontrées sont très étroitement liées :
- Aux réalisateurs, à qui nous devons des arguments convaincants pour nous permettre d'enregistrer ces sons, mais aussi à leurs volontés de les faire pendant le tournage,
- A l'assistant-réalisateur qui a en charge l'organisation du plateau, au travers du découpage et du plan de travail.
- A la mise à disposition d'un assistant mise en scène, d'un ou plusieurs régisseurs, dont le rôle consiste à organiser et à rassembler les matériaux qui nous sont nécessaires. Nous entendons par là, les véhicules, la figuration, les objets en tous genres, etc.
B- Les Formats d'enregistrement.
Concernant la question des formats, nous reconnaissons qu'il faut adapter au mieux la prise de Sons Seuls afin que ceux-ci soient les plus utilisables lors de la postproduction, tout ceci étant défini lors de la réunion de pré-tournage en présence du Chef Opérateur du Son, du Monteur Son et du Mixeur.
En règle générale, le taux d'échantillonnage est de 48 kHz.
Mais pour certaines applications, comme le film animalier ou l'archivage, le taux de 96 kHz est à considérer avec intérêt.
La quantification est à choisir entre 16 ou 24 bits.
Le principal obstacle à la non-utilisation du 24 bits en postproduction était lié aux machines de montage image. Le parc est en pleine mutation et tous les systèmes actuels acceptent ce format de quantification.
De plus, la recommandation CST pour les PAD HD ainsi que le passage au cinéma numérique implique de travailler en 24 bits.
L'aspect « générationnel » de la prise de son.
Le MS en était l'exemple parfait au cours des années 80. En effet, la stéréophonie MS a eu pendant longtemps la part belle dans l'enregistrement des Sons Seuls, en raison des problèmes que causait la stéréophonie de phase lors du repiquage. Ces problèmes sont résolus aujourd'hui et il n'y a plus de raison de ne pas utiliser les couples AB, ORTF ou XY si le besoin s'en fait sentir.
Actuellement, une prise de son qui semble être la plus appropriée aux formats de postproduction est celle du type « LCR », car elle se rapproche de la disposition des trois canaux discrets d'une salle de cinéma.
Il existe de nombreux moyens de faire du LCR (ne souhaitant pas rentrer dans les débats de « normalisation » de ce type de prise de son), et quoique la mise place d'un tel système, soit un peu plus lourde qu'une stéréophonie classique le résultat offre une richesse sonore très intéressante.
Voici l’exemple d’un procédé peu académique, mais qui peut être utilisé en LCR ou en 5.0
Ambiance d’un repas de mariage dans un château.
- Un couple MS en Plan Moyen
- L’assistant son à la perche. Il va de table en table pour les Gros Plans.
- Un couple AB en Plan Large dans une salle voisine (le couple AB peut très bien être placé dans les canaux arrière en 5.0).
Le Couple MS :
La Perche :
Le Couple AB :
La Perche et le Couple MS :
La Perche et le Couple AB :
La Perche, le Couple MS et le Couple AB :
Concernant la prise de son double MS, il s'avère que ce n'est qu'une simple « évolution » du MS et elle provoque les mêmes problèmes et réticences de la part du monde de la postproduction (avec des difficultés accrues au moment du décodage).
D'autre part, malgré l'intervention de certains en faveur du Soundfield (Format B), il apparaît que celui-ci n'est pas un « microphone magique », à savoir que la captation avec ce microphone sans « orienter » cette dernière ne permet pas, en postproduction de faire ressortir les évènements comme on le souhaite.
Concrètement, les expériences en double MS, en format B ou en d'autres systèmes multicanaux se justifient sur certains décors particuliers : riches ou spécifiques et très propres. La crainte étant d'apporter beaucoup plus de pollution que de son utile.
C- Faut il engager prématurément le Monteur Son pour l'enregistrement des Sons Seuls ou prévoir un opérateur du son supplémentaire ?
Aux vues des demandes de la postproduction, il est pratiquement impossible au Chef Opérateur du Son de « tout » enregistrer. Trouver « la bonne » personne n'est pas une mince affaire, car il n'est pas envisageable de confier cette lourde tâche à un individu exempt de connaissance et d'expérience dans la pratique de la prise de son.
Voici 3 exemples d’enregistrements de Sons Seuls faits par des stagiaires qui n’ont pas reçu d’instructions.
Les 2 premiers Sons Seuls sont des ambiances. Elles ont été enregistrées avec les chutes et des hausses de niveau sans aucune raison. Il a fallu 2 fois plus de temps en postproduction pour « nettoyer » ces ambiances par rapport à des sons normalement enregistrés.
Le dernier Son Seul est un rouling avec le battement d’un essuie-glace. Le bon sens aurait voulu que le rouling et le battement fussent enregistrés indépendamment l’un de l’autre.
Ambiance 1 :
Ambiance 2 :
Rouling et essuie-glace :
Le Monteur Son sait ce dont il a besoin pour la postproduction, il pourrait donc venir enregistrer les Sons Seuls. Ainsi, on peut citer l'exemple du « rouling » voiture qui ne sera pas enregistré de la même manière par le Chef Opérateur du Son ou par le Monteur Son.
A contrario, le Chef Opérateur du Son connaît bien mieux le terrain, maîtrise mieux le scénario, le film et surtout l'équipe.
On peut donc proposer les solutions éventuelles dans l'ordre suivant :
- L'ingénieur du son en second
- Second Assistant Son
- L'ingénieur du son référant
- Le Monteur Son
L'ingénieur du son en second, il semble que ce soit la meilleure des solutions, en ce sens que l'on aurait l'assurance de la qualité du travail effectué.
Le second assistant son, serait recruté par l'ingénieur du son référant, s'assurant de sa qualité professionnelle, en sa capacité à exécuter les tâches qui lui seraient confiées, y compris les Sons Seuls. Afin d'éviter les dérives, il n'est pas souhaitable que la responsabilité de ce recrutement soit prise par la production du film.
L'ingénieur du son référant pourrait aussi élaborer ces sons, mais sous certaines conditions. Il les ferait hors tournage. Cette action serait à planifier avec la production au titre de prise de son complémentaire sur une ou deux semaines. Ceci à juste titre, car l'élaboration des Sons Seuls constitue une importante somme de travail supplémentaire, et que pour de nombreuses raisons, il n'est plus raisonnable de les effectuer sur les heures de repas ou de repos. A titre de rappel, le cumul des temps additionnés de tournage synchrone, d'enregistrements de Sons Seuls, de sauvegarde informatique et autres gravures, voir de rectifications diverses et variées ou réajustements sur le rapport son en fin de journée augmentent de manière significative et excessive les heures de travail.
Et enfin, le Monteur Son endossant le rôle de preneur de Sons Seuls sur le tournage, dans un premier temps et dans le cadre de son travail en postproduction, conjointement au réalisateur, dans un deuxième temps ou ils décideraient ensemble des sons supplémentaires à enregistrer afin d'enrichir l'identité sonore du film.
Session C
Le Montage Son
A- Difficultés et Contraintes du Monteur Son.
1. La plupart du temps, le Monteur Son est recommandé par le Monteur Image ou bien par le Mixeur qui ont été choisis bien en amont par la production. De ce fait, il n'est donc pas souvent présent lors des réunions décidant des choix technico artistiques qui influeront sur l'élaboration de la bande sonore du film.
Ainsi, les réunions préparatoires abordent rarement la question des Sons Seuls !
Ne devrait-on pas demander au Chef Opérateur du Son de tournage, qui est aussi concerné par cette question, de réclamer au moins une réunion avec l'équipe de postproduction au complet avant le tournage ?
2. D'après un constat général, la concentration d'un réalisateur sur le travail fait par le Monteur Son est très difficile à obtenir, surtout en période de montage image.
En fait, le réalisateur va souvent découvrir la bande-son de son film, et a fortiori le montage son, lors de l'étape du mixage.
Sur les quatre composants constituant la bande sonore, c'est à dire les paroles, le bruitage, le montage son et la musique, seuls deux peuvent être sérieusement modifiés pendant le mixage. Ce sont les paroles et le montage son.
C'est pourquoi le Monteur Son se retrouve souvent à devoir en faire plus qu'il n'en faut !
Il doit pouvoir proposer toutes les solutions alternatives au montage qu'il a imaginé en fonctions des demandes généralement instantanées faites au mixage. Le retour à la salle de montage n'est pas envisageable et les ajouts (plus ou moins compliqués) se font dans l'auditorium.
Le Monteur Son doit donc avoir toujours à portée de main une sonothèque (souvent personnelle) pendant le mixage.
3. Le temps de travail accordé au Montage Son ne tient souvent pas compte des particularités liées à chaque projet. Les demandes technico artistiques sont variables d'un type de film à l'autre et les modèles de planning des productions sont assez rigides. De plus, la tendance générale est à la réduction de l'allocation du temps de travail d'année en année.
B- Les étapes du Montage Son :
On considère que le Montage Son se divise en trois phases de travail :
1ère Phase :
1- Réception des Sons Seuls enregistrés en tournage.
2- Acquisition des Sons enregistrés pendant le Montage Son.
3- Collecte Sonothèque.
2ème Phase :
1- Transformation des Sons Seuls acquis lors de la 1ère Phase.
2- Création sonore ou Sound Design.
3ème Phase :
1- Composition et Assemblage c'est à dire le Montage Son en lui-même.
Les deux premières phases représentent à peu près 25 % du temps de travail, le montage en lui-même, représente 75 % du temps.
Ces phases ne sont pas aussi bien définies pendant le montage son et la frontière entre elles est assez floue. Un film d'époque ou d'anticipation verra les pourcentages des phases 1 et 2 augmenter fortement par exemple. Ou encore, si le nombre de Sons Seuls propres au film est très faible, la phase 2 (transformation) va prendre beaucoup d'importance au détriment de la phase 3 (composition-montage).
NB : On constate que sur les tous les éléments utilisés lors du montage son d'un film, les Sons Seuls enregistrés pour ce film représentent dans le meilleur des cas 70 %. La moyenne est plus proche des 30 % sachant que de nombreux témoignages montrent que la tendance va vers les 10 %.
Voici plusieurs exemples d’enregistrements de Sons Seuls avant et après transformation.
- Des chutes d’obus de mortier sur un réceptacle de tir. Ces chutes ont été enregistrées avec un DAT préréglé sans savoir ou les obus allaient tomber (Danger !). L’heure de l’exercice était à 18 h 30 au mois de mars, c’est à dire au moment du coucher du soleil, l’heure de la pleine activité des oiseaux.
L’enregistrement d’origine : Mortier oiseaux
L’enregistrement sans les oiseaux & compressé : Mortier nettoyé
L’enregistrement « Grand Spectacle » :
- Des Grenouilles, le soir en Normandie. L’enregistrement original est pollué par un ronronnement provenant d’un générateur.
Les grenouilles, le soir enregistrement original :
Les grenouilles, le soir enregistrement nettoyé :
- Des cloches d’une petite église de village. Les cloches ont été enregistrées en Plan Moyen et elles n’auraient jamais dû être transformées. Le montage image en a décidé autrement puisque toute l’action se passe au pied de l’église. La transformation a permis de rapprocher artificiellement les cloches.
Les cloches originales :
Les cloches Rapprochées :
C- Différentes propositions pour l'enregistrement des Sons Seuls en tournage :
Certaines des propositions qui vont suivre vont paraitre évidentes à nombre d'entre nous, mais il est bon de les rappeler.
Ne pas oublier que nous dépendons tous du Montage Image !
Le Montage Image va jouer sur la dilatation ou la contraction du temps.
Il peut aussi changer le rythme de certaines actions (exemple : discussion dans une voiture sous la pluie avec le ronronnement des essuie-glaces).
Il peut changer la vitesse d'un véhicule (généralement, la vitesse est accélérée).
Il peut changer les rapports entre les plans sonores.
Penser que le Monteur Son doit travailler aussi bien pour la Version Originale que pour la Version Internationale.
Penser chaque séquence sans dialogue pour évaluer l'importance des Sons Seuls à enregistrer en priorité.
Concernant les ambiances raccords, enregistrer uniquement celles ayant un intérêt esthétique et narratif par rapport au contexte du film.
Éviter d'enregistrer les ambiances raccords polluées par les parasites techniques liés au tournage si le manque de temps se fait sentir (ex. : buzz d'éclairage, ventilation, camion groupe...). Ce style de raccord a beaucoup de chance de se retrouver à la poubelle !
De plus, rien n'empêche de doubler la prise de son d'une ambiance raccord monophonique avec une prise de son stéréophonique ou en multicanal.
Pour l'enregistrement d'effet sonore, penser en priorité à enregistrer un Gros Plan de l'objet, car il est plus facile de l'éloigner en postproduction que l'inverse.
Ne pas négliger l'enregistrement d'autres plans sonores si le temps le permet dans un deuxième temps.
Voici un enregistrement irréprochable, mais pour certaines raisons il n’a pas pu être utilisé.
Le son démarre avec les pas d’une femme dans une chapelle. Les pas sont très beaux, mais ils seront surement très difficiles à resynchroniser en postproduction. Le travail d’un bruiteur sera plus efficace. Puis, elle ouvre une porte et la referme, mais cette porte est trop éloignée du microphone. Ce son est devenu inutilisable parce que la porte a été filmée en Gros Plan.
Annonce pas femme porte (1 ' 18'')
Pour tout enregistrement d'effet sonore, penser à installer un calme avant et après l'action.
De plus, l'action enregistrée doit avoir un vrai début et une vraie fin.
D- Proposition d'une liste de Généralités.
Nous ne voulons pas énumérer tous les cas de figure. Le but de cette petite liste est de donner des exemples concrets de Sons Seuls les plus souvent demandés dans le cadre de la production française actuelle avec le cahier des charges que nous connaissons tous :
Le temps pour enregistrer les Sons Seuls est compté !
Véhicules :
- Portières et coffre :
- Préférer une prise de son extérieure. (Ce type de Son Seul nécessite un environnement beaucoup plus silencieux que les autres sons de véhicules.)
- Astuces pour les roulings : Le surrégime moteur est très efficace pour donner l'impression de vitesse.
- N'oublions pas de faire couper les Talkies et de demander au conducteur d'enlever sa grosse parka d'hiver.
Foules :
- Pour les ambiances vocales de foule :
Penser toujours à la Version Internationale ! (Eviter si possible de faire ressortir des éclats de voix en langue compréhensible)
- Silences habités : Foule dans un tribunal, Enfants dans une salle de classe, Scène de crime, Spectateurs dans un théâtre... Ce type de son est très difficile à reproduire en postproduction, penser à les privilégier.
Portes et Fenêtres :
- Ouvertures et Fermetures : Privilégier les actions en gros plan, toujours précédées et suivies d'un silence.
Toujours essayer de faire trois niveaux d'intensité (doux, normal et énergique)
Animaux :
Privilégier les cris, grognements, souffles et présences.
Concernant les mouvements : Au-delà de trois sons de même nature, le Son Seul est essentiel. (ex. : Un groupe de quatre chevaux au galop, une meute de chiens...). En dessous de ce nombre, le travail du bruiteur sera beaucoup plus efficace (ceci s'applique aussi pour les humains).
Session D
La Sonothèque
A- Est ce que les Sons Seuls d'un tournage peuvent couvrir les besoins du montage son ?
La réponse est clairement non pour les films produits en France !
Néanmoins sur certains films américains et surtout ce que l'on appelle les « A Movies », c'est à dire des films à gros budget, des « Sound Recordists » sont engagés spécialement pour l'enregistrement des Sons Seuls pour le film.
Ils sont recrutés soit par la production soit par la société qui se charge de la postproduction sonore du film. (ex. : Sound Deluxe, Sounddogs, etc.)
D'où l'utilité de l'apport de la sonothèque.
Ceci est d'autant plus vrai pour les sons dont les sources sont soit :
- Devenues rares.
- Très difficiles à enregistrer.
- Très difficiles à reproduire.
Les exemples sont nombreux, mais nous pouvons citer entre autres, les trains à vapeur, les vieux véhicules automobiles, les migrations d'oiseaux, une tempête, etc.
De plus,certains Sons Seuls ne peuvent pas être utiles au montage son pour des problèmes de saisons ou de lieu par rapport aux besoins du film.
Ils peuvent par contre être potentiellement utilisables pour la constitution de sonothèque.
B- Pourquoi les sonothèques françaises traditionnelles n'existent-elles plus ?
La gestion des sonothèques était adaptée à une époque, une économie, un mode de production.
Du temps du montage 35mm, le budget sonothèque pour un film standard, repiquage compris, pouvait atteindre 20 000 € !
Le principe de fonctionnement était basé sur la mutualisation des Sons Seuls enregistrés pendant les tournages de films, concept qui a progressivement atteint ses limites.
En effet, la paternité des sons « sources » ainsi que la rétribution des ayants droit étaient difficilement administrables. Tenir un fichier complet, à la main, était un travail de longue haleine et le risque d'erreur était important.
Paradoxalement, les transformations du paysage sonore avec la venue des systèmes de diffusion en multicanal, donc a priori une demande accrue de sons, a précipité la disparition de ces sonothèques.
L'adaptation aux nouveaux modes de consommation a été mal anticipée.
Les enregistrements « source » ainsi que leurs copies « valorisées » étaient stockés sur d'anciens supports (Bandes 6,25 et DAT). Les bandes ont vieilli, l'oreille des utilisateurs a évolué et elle s'est habituée aux nouveaux standards (48 kHz/24bits) et on a qualifié ces sons de « daté ».
Conséquence de ceci : les étapes d'écoute des sons en sonothèque et du repiquage ont disparu. Elles étaient, de plus, une source de revenus non négligeable pour ces sociétés.
Pour compléter ce tableau, les productions qui ont vu disparaitre ces deux phases de leurs lignes de frais n'ont pas compensé en achetant plus de sons, mais au contraire l'allocation des « budgets sonothèque » a chuté.
C- Le Piratage
Le Monteur Son à toujours dû se débrouiller pour trouver des sons supplémentaires afin d'agrémenter son montage.
Les échanges entre Monteurs Son (prêt, troc, vente) à un niveau personnel se sont transformés, du fait de l'évolution des supports et de l'apparition d'internet, en une possibilité de piratage massif et rapide.
Ainsi, le travail de valorisation du son « source » n'est plus rémunéré.
Il ne devient plus rentable de gérer une sonothèque que tout le monde peut se procurer facilement sans payer.
Par conséquent, aujourd'hui en France, presque plus personne ne gère de sonothèque commerciale.
Il faut néanmoins savoir que les grosses sonothèques américaines sont elles aussi assujetties à la problématique du piratage, mais ceci est tempéré par leur large diffusion commerciale à l'international.
La conséquence de ce comportement est l'uniformisation des sons utilisés pour la conception des bandes sonores des films.
D- Les sonothèques en ligne
La dématérialisation du support caractérise le fonctionnement des sonothèques en ligne.
Les avantages de ce type de sonothèques sont nombreux :
- Constant renouvellement du contenu.
- Achat de sons à la carte.
- Meilleur contrôle du piratage.
Il y a néanmoins un inconvénient :
Quelques sonothèques en ligne fonctionnent aussi sur le principe de mutualisation des sons. Les contributeurs peuvent parfois oublier d'identifier la provenance de leurs sons. De ce fait, les sociétés qui gèrent ces sonothèques doivent d'être certaines de la paternité des sons « source » avant leur mise en ligne.
Aujourd'hui, les sonothèques francophones sont peu rentables.
Seules quelques sonothèques en ligne Anglo-saxonnes sont viables économiquement.
Certains éditeurs commercialisent leurs sonothèques en ligne, mais leur catalogue existe déjà sur CD. Malheureusement, on peut dire que, c'est peine perdue face au piratage.
E- Propriété des sons
A qui appartient le son ? A celui qui l'enregistre ? A celui qui le paye ? Faut-il, comme l'ont fait les photographes, se battre pour avoir des droits d'auteur ?
Un Chef Opérateur image n'a pas de droits sur les images qu'il capte, pourquoi serait-ce différent pour un Chef Opérateur du Son ?
Une chose est sure :
Le son « source » est la propriété de celui qui l'a commandité et payé.
- Cela peut être la propriété de la société de production.
- Du Chef Opérateur du Son s'il l'a enregistré sur son temps personnel et avec ses propres deniers.
- Ou de toute autre personne (ou organisation) qui enregistre des sons pour son propre compte avec son propre argent.
Mais une autre question se pose :
Qu'en est-il de la valorisation du son ?
Parfois, la valorisation est telle, qu'il est difficile de trouver des concordances entre le son « transformé » et le son « source ». Donc qu'elle est la paternité de ce « nouveau » son ?
On pourrait émettre l'hypothèse suivante :
Le son « valorisé » est la propriété de celui qui l'a commandité et payé.
Voici un exemple de son valorisé.
Un brame de cerf. Ce brame a été enregistré dans des conditions assez difficiles. Le cerf se trouve à 150 mètres du microphone. Il y a un peu de vent dans les arbres. A 3 kilomètres, dans l’axe de visée, se trouve une autoroute. Une réverbération a été ajoutée dans le son valorisé pour reconstituer l’ambiance que l’on aurait entendu si le cerf avait été sous une futaie.
Le brame de cerf original :
Le brame de cerf valorisé :
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