Point sur la Convention Collective Cinéma (9/11/2009)
CONVENTION CINEMA :
Les négociations ont repris au mois de septembre. Voici un bref historique pour que chacun s'y retrouve, et un aperçu de la situation nouvelle créée par les dernières propositions émanant d'une partie des producteurs.
Rappel historique et définitions
Définition 1 : Une convention collective est un accord entre des organisations d'employeurs et des syndicats de salariés reconnus . Elle encadre et règlemente les contrats de travail et leur exécution. Une convention collective est relative à un type d'activité. Elle peut aussi être nationale ou restreinte à une région, à un département, voire propre à une entreprise .
Le contrat de travail doit obligatoirement mentionner la convention collective dont relève l'entreprise, et un exemplaire doit être disponible pour consultation dans l'entreprise par les salariés.
Une convention collective nationale pour le cinéma fut négociée après-guerre et signée en 1950. Elle connut différents remaniements, mais globalement elle fut bien appliquée jusqu'aux années 80, même si elle n'a jamais étéétendue. Vous pouvez la consulter , ainsi qu'un grand nombre d'avenants sur ce site, à la rubrique « Vie professionnelle » .
Définition 2: Initialement, les conventions collectives ne concernaient que les entreprises signataires. L'extension d'une convention collective est un décret du ministre du Travail rendant obligatoire l'application d'une convention collective à l'ensemble d'un secteur professionnel, et non plus aux seuls signataires de la convention.
Les années 80 voient se produire une dérégulation, avec des films de plus en plus nombreux, mais dont une proportion grandissante ne se fait pas « au tarif ». C'est l'époque de "l'invention" des forfaits, et des moins vingt, moins trente, etc... que nous connaissons.
Parallèlement, suite à l'éclatement de l'ORTF et l'entrée massive du secteur privé dans la production télévisuelle, accentuée par les décrets Tasca de 1992, la production de films de fictions pour la seule diffusion à la télévision se développe rapidement. Dans les débuts, les producteurs de fictions télévisuelles appliquent les mêmes salaires que dans la production cinématographique. En 1999, ils tentent de faire baisser considérablement les salaires , ce qui déclenche une grève dans quasiment tous les tournages de téléfilms et de série, qui aboutira aux accords de salaires de 2000 et 2001 puis l'établissement de la Convention Collective de la Production Audiovisuelle (CCAV), étendue en 2007.
Entretemps, en 2003, la désastreuse réforme des annexes 8 et 10 de l'ASSEDIC est passée par là, avec d'un côté le durcissement des conditions d'accès à l'assurance chômage et de l'autre une politique enfin volontariste du Ministère du Travail ( à l'époque G. Larcher) afin d'accélérer la négociation puis la signature de conventions collectives étendues dans tous les secteurs du spectacle.
Situation actuelle
Aujourd'hui, et ce indépendamment des niveaux de rémunérations desdites conventions collectives, seul le cinéma reste sans couverture conventionnelle étendue.
En 2005, les organisations de producteurs en présence annoncent de très fortes baisses de salaires par rapport à la convention en cours non étendue, sans faire de propositions chiffrées. Quand ils en font enfin en 2006, elles ne satisfont pas les 2 syndicats majeurs de nos professions (SNTPCT et CGT) . Une mobilisation unitaire est lancée contre des propositions de salaires aussi basses, avec quelques journées de grèves. En juillet 2007, un accord de sortie de grève est signé par nos syndicats de salariés avec les 3 plus « gros » syndicats de producteurs (APC, UPF, API) qui garantit au moins sur le papier, les salaires de base pendant la suite de la négociation.
Définition 3 (*): les organisations d'employeurs sont cinq, et parfois très divisées :
APC = Association des Producteurs de Cinéma, la principale, héritière de la chambre historique (ex- rue du Cirque la CSPEF ) seule signataire avant qu'elle ne dénonce cet engagement ancien le 23 mars 2007. (producteurs de films de gros et moyens budgets)
UPF= Union des Producteurs de Films , un peu déshabillée par le nouveau « dynamisme » de l'APC (producteurs de films de moyens budgets)
API= Association des Producteurs Indépendants, en fait Pathé, Gaumont , MK2 (producteurs de films de gros budgets)
SPI : Syndicat des Producteurs Indépendants, le « gros » syndicat des « petits » ou soi-disant tels (producteurs de films de moyens et de petits budgets, habitués à souvent faire travailler les gens à - 20% + au forfait, voire pire)
AFPF : Association Française des Producteurs de Films, une vieille chambre réinvestie par quelques producteurs, un SPI bis ?
Après le maigre espoir ... le ralenti
Avec l'accord de juillet 2007, c'est l'histoire de la bouteille à moitié vide et à moitié pleine : une partie des employeurs (APC, UPF, API ) veulent bien garantir une partie de nos rémunérations (salaires de base 39 heures mais sans les heures majorées, prépa, heures supplémentaires, heures de nuit...).
Et la négociation reprend très lentement, d'une part parce que chacun campe sur ces positions et d'autre part parce que la discussion sur les définitions de poste est fastidieuse. Il faut enfin redonner un cadre au Comité Hygiène et Sécurité (CHSCT) Cinéma , dont la gestion est éclaboussée par l'affaires des Congés Spectacle (la Cour des comptes fustige une gestion désastreuse, une collecte indue via le CHSCT, des détournements pour alimenter diverses organisations : l'instruction est en cours)... Donc la négociation avance lentement et les employeurs ne sont pas pressés de ressortir des propositions de salaires, coincés entre leur désir de baisser les salaires (ce qui reviendrait à officialiser la baisse des salaires souvent pratiquée dans les faits) et la peur de relancer un mouvement de grève, comme celui de 1999, provoqué par les propositions de salaires de leurs collègues de la production audiovisuelle ( l'USPA).
Aujourd'hui, l'obstacle majeur reste la question des salaires mais pas seulement.
En décembre 2008, des ouvriers et techniciens lancent spontanément un rassemblement devant l'immeuble du Ministère du travail où se déroule la négociation et cela permet d'obtenir la prorogation d'un an de la convention collective du cinéma... Cette prorogation ne garantit hélas pas une application obligatoire des salaires dans le cinéma mais elle permet de rassurer l'ensemble des professionnels et de négocier plus sereinement.
Jusqu'à présent, la prorogation des salaires n'a pas permis d'assurer que l'ensemble des professionnels du cinéma soient rémunérés au tarif, et que l'ensemble des majorations soient appliquées. Cette prorogation offre cependant un cadre permettant de nous assurer que la négociation s'inscrit dans les « usages » de la convention collective de 1950. L'objectif essentiel n'est il pas d'obtenir une couverture conventionnelle d'application obligatoire ? Mais pas à n'importe quel prix, bien sûr.
Depuis le mois de juin 2009 la triplette de syndicats de producteurs (APC, UPF, API) a mis sur la table une nouvelle proposition de salaires, sortes de forfaits incluant les heures de préparation. Ces propositions sont nettement plus élevées que celles de 2006 mais ne satisfont pas encore les syndicats. On peut consulter cette proposition , et surtout la comprendre, en se rapprochant du SNTR-CGT et du SNTPCT ( cf leurs sites web, par exemple)
En quelques mots, cette proposition de salaires s'approche du niveau de « l'ancienne » convention, mais par en dessous. D'un autre côté si ces salaires étaient appliqués à tous les films en dessous du tarif, faute de convention étendue, cela constituerait une avancée pour des milliers de professionnels rémunérés, certes selon la grille de 1950, mais avec des salaires aujourd'hui amputés de moins 10, 20 , 30, % au gré des productions, sans évoquer même le paiement des majorations. !
On mesure aujourd'hui, que les propositions qui nous sont faites par les employeurs impliquent une remise en cause importante des « usages » de la convention collective de 1950. Ainsi, voit on apparaître la notion de forfaits garantis, par exemple.
Quels sont les objectifs de nos syndicats en la matière ?
Certains souhaitent la reconduction, à l'identique, du texte de 1950 alors même que ce texte n'a jamais été étendu.... Les syndicats doivent ils s' inscrire dans le cadre conventionnel dessiné par les employeurs, en imposant par leur légitime et respectable combat, voire par la grève, de meilleures garanties que celles qui nous sont proposées ?
Il est évident que les 2 (*) organisations syndicales et l'ensemble des associations professionnelles ont le devoir de se rapprocher afin de répondre ensemble à ces questions, l'enjeu est de taille, et d'obtenir une solide convention collective pour tous , c'est à dire étendue, pour les années à venir, tout en permettant l'existence de l'ensemble de notre cinématographie.
Aucun professionnel ne peut nier l'existence de films dits « fragiles ». Mais chaque professionnel pense, du moins je l'espère, que la variable d'ajustement doit cesser d'être les salaires. D'autres solutions existent à la fausse question des « films-à-petit-budget-qui-disparaîtraient-si-la convention-était-étendue ». Il paraît que le CNC réfléchit à la question.
- d'une part suite au rapport du Club des 13 demandant une meilleure répartition des aides vers les films à petit et moyen budget, (la répartition des aides de l'Etat est jugée aberrante, allant dans des proportions trop importantes vers des films qui sont déjà bien financés et ne permettant pas "d'approvisionner" les films les plus défavorisés tel qu'on pourrait se l'imaginer de la part d'une "aide de l'Etat".)
- d'autre part en étudiant un système de dérogations encadrées sur l'application des salaires sur certains films...
A suivre....
* Du côté salariés, deux syndicats ont des adhérents dans le cinéma, donc sont réellement représentatifs:
SNTPCT : adhérent à la CGT jusqu'en 1981, autonome depuis.
SNTR-CGT, SGTIF-CGT, SFR-CGT : dans l'ordre syndicats des Techniciens, des Ouvriers, des Réalisateurs, rassemblés dans le Fédération du Spectacle CGT.
Et il existe des syndicats qui n'ont pas forcément d'adhérents, mais que la loi estime « représentatifs » :
CFDT : la fédération F3C en l'occurrence, au moins présente à la négociation.
CFTC, CGC, FO : tellement inexistants dans le secteur qu'on ne les voit pas aux réunions de négociations ni aux séances de travail...
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