Que se passe-t-il à l’École Louis Lumière ?
L'AFSI, dont beaucoup de membres sont d'anciens étudiants de cette école, a cherché à comprendre les enjeux de la crise qui secoue "Louis Lumière".
Notre article a suscité des réactions. Vous trouverez donc ci-après 3 parties distinctes.
- Que se passe-t-il à l’École Louis Lumière ? article publié le 16 février
- Droit de réponse de la direction publié le 17 février
- Droit de réponse de l’intersyndicale de l’ENS-Louis-Lumière publié le 22 février
1) Que se passe-t-il à l’École Louis Lumière ?
À trois ans de fêter son centenaire, la vénérable école nationale supérieure Louis Lumière (ENSLL) traverse une zone de turbulence. La faute à un projet de déménagement qui déchaîne les passions : pétition alarmiste lancée par des étudiant.e.s et enseignant.e.s, réponse de la direction intitulée «Halte à la désinformation», AG des étudiant.es en présence de représentant.e.s de syndicats, d’associations professionnelles et de la presse… Désireuse d’y voir plus clair, l’AFSI a envoyé sur place un correspondant pour tenter de démêler le vrai du faux.
Victime collatérale du sport
Rappelons que l’École Louis Lumière loue depuis 2012 des locaux sis dans la Cité du Cinéma, rue Ampère à Saint-Denis, après avoir dû quitter, déjà dans un climat d’inquiétude, les bâtiments dont elle était propriétaire à Noisy-le-Grand et qui commençaient à se fissurer (la faute à des erreurs d’appréhension de la qualité des sols). Bâtiments où, rappelons-le, elle avait emménagé en 1989, «pour toujours» vantait-on alors, et… dans un climat de protestation, déjà, avec manifestations des étudiant.es et déroulement de banderoles sur les tours de Notre-Dame… On s’inscrit donc, jusqu’ici, dans une tradition bien installée.
Les ennuis commencent en 2017, quand Paris hérite des JO 2024 durant lesquels la Cité du Cinéma accueillera les sportifs. Pour des raisons de sécurité, il devient vite évident que les entreprises du site seront inaccessibles pendant toute la durée des Jeux. L’école s’interroge sur la marche à suivre : où s’exiler pendant ce temps-là, et combien de temps ? C’est qu’il n’est pas facile de déménager un établissement dispensant un enseignement aussi complexe : des tables et des chaises, ça se trouve ailleurs, certes. Mais des labos photos ? Des studios tout équipés ? Des plateaux de tournage ? Face aux inquiétudes des professeurs et des élèves, l’administration parle d’abord d’un déménagement de «quelques mois». Qui deviennent six mois. Puis quinze. Sans qu’aucun lieu soit évoqué. Et ainsi, le temps passe.
Opération «Condorcet»
Les 4 kilomètres de la discorde
C’est en octobre 2022 seulement que la direction évoque enfin un déplacement sur le Campus Condorcet, près du métro Front Populaire : pas de panique, il s’agit alors toujours d’un déplacement temporaire. Et puis, le 25 janvier 2023, l’annonce tombe : en fait non, ce sera définitif.
De là le branle-bas de combat, l’incompréhension, les craintes : il faut dire que les locaux en question n’ont pas grand-chose pour rassurer les étudiant.e.s comme leurs professeurs. De 7500m², l’école passerait à 2500m² («Oui, mais les locaux actuels sont trop grands», leur répond en substance la direction). D’un site unique, on passerait à plusieurs bâtiments distincts, éloignant les sections les unes des autres par 10 minutes de marche («5 minutes», corrige le directeur). Et puis, ces locaux ne viennent pas de n’importe où : ils ont été délaissés par l’EICAR, une école d’audiovisuel privée, dont des élèves de Louis Lumière sont allés contacter certain.e.s ancien.ne.s étudiant.e.s : d’après eux, l’EICAR serait partie car l’emplacement était «trop petit», «pas pratique», et que l’environnement professionnel, dont la direction de Louis Lumière vante pourtant le dynamisme, n’aurait pas apporté aux élèves les opportunités escomptées. Qu’à cela ne tienne : pas assez bons pour une école privée, ces locaux ont été jugés parfaits pour une école publique qui vise l’excellence. «Les équipements, les investissements et les moyens seront maintenus sur le prochain site, pour que les étudiants des trois masters cinéma, photo et son continuent de travailler dans les meilleures conditions», assure la direction sur le site de l’ENSLL. Celle-ci est tellement sûre de son choix qu’au 13 février elle n’avait pas programmé de visite, par les professeurs, des futurs locaux. Dommage, car un membre bien informé du personnel, qui a pu les voir, nous a confié qu’ils étaient «complètement inadaptés».
Pour ne rien arranger, la communication de la direction peine à rassurer tout le monde. Il faut avouer que la personnalité du directeur cristallise des rancœurs depuis sa prise de fonctions, et que l’opposition à ce déménagement se superpose à des conflits de personnes : l’ambiance délétère qui en résulte, et dont on se gardera bien de chercher les premiers responsables, n’aide pas à un travail serein sur ce dossier. Qu’on se contente de juger la qualité des explications données aux élèves : pour leur démontrer que le futur site, bien qu’éclaté, favorisera contre toute évidence une meilleure interaction entre les différentes sections, le directeur leur aurait fourbi cette élégante métaphore : «Louis Lumière, c’est comme des lasagnes, et dans des lasagnes, le petit pois du dessus a du mal à rencontrer la carotte qui est tout en-dessous». Probablement plus habitués des kebabs et autres raviolis en boîte, les élèves n’ont pas su goûter la comparaison.
Tournage avec pré-production réduite
L’autre objet de querelle porte sur le calendrier : le déménagement intégral et définitif d’une école telle que celle-ci demande au moins trois ans de préparation. Les ancien.ne.s professeurs le savent bien, qui ont vécu l’arrivée tumultueuse dans les locaux de Noisy, puis de Saint-Denis, alors qu’elle avait été très préparée. Il a fallu essuyer les plâtres et prendre le temps de retrouver un fonctionnement normal. Mais l’école, fière de s’inscrire dans l'air du temps, semble vouloir suivre une tendance actuelle qui veut qu’on réduise toujours plus la pré-prod avant le tournage : l’annonce faite en janvier 2023 vise un déménagement sur cinq semaines, conclu pour… la rentrée de janvier 2024. Le calcul est vite fait : il reste à tout ce petit monde moins de 10 mois pour tout organiser. Sans que les professeurs aient pu encore voir les locaux pour planifier quoi que ce soit. Et dans un climat d’opposition, alors qu’une telle entreprise impose un dialogue constant et fructueux entre les différentes instances. Et puis, aucune réponse, d’après les élèves, ne leur est vraiment apportée sur le fonctionnement futur : quid de la salle de projection ? La direction prétend que le futur site en contient une, mais elle fait 50 places (contre une centaine pour l’actuelle), et ne serait qu’une salle de classe aménagée. Quid des plateaux, puisque Condorcet n’en a qu’un, et le site actuel 2 ? (contre 3 à Noisy, mais ceci est une autre histoire) «Ils nous ont répondu évasivement qu’on en louerait selon les besoins», prétendent les élèves. «Aux studios de la Montjoie. Or on les a appelés, ils nous ont dit qu’ils n’étaient pas au courant, et qu’en plus ils sont sceptiques sur les disponibilités à venir». Forcément, si les jeunes veulent tout, tout de suite…
Culture de la contestation
À l’Assemblée Générale organisée par les élèves dans la cour de l’école, ce froid lundi 13 février 2023, les prises de paroles se succèdent : étudiant.e.s actuel.le.s et ancien.ne.s, lecture de messages de soutien, interventions de professeurs… Ces derniers sont rares : d’une part, car tous ne sont pas aussi opposés au déménagement. D’autre part, car on parle de menaces de sanctions pour ceux qui soutiendraient les élèves de trop près. Certains membres du personnel ont d’ailleurs déjà écopé d’un avertissement… Les peurs s’enchaînent au micro et parfois se mélangent un peu : que viennent faire les rumeurs de formations payantes là-dedans, par exemple ? Évoquées dans la pétition, elles sont balayées par la direction qui écrit : «Nous avons simplement l’objectif de développer des formations par apprentissage de machiniste et de chef électricien en deux ans.» Un professeur me confie : «C’était peut-être inadapté d’en parler dans la pétition. Mais on a tellement peu d’infos de la part de la direction…».
Assemblée générale dans la cour de l’école, le 13 février 2023, devant 50 à 100 personnes (on ne connaît pas les estimations de la police)
La peur d’un «démantèlement» de l’enseignement revient aussi. Les locaux plus petits obligeraient mécaniquement à laisser derrière soi des machines, des équipements, qui entraîneraient en retour une réduction des exercices pratiques, remplacés par davantage de cours sur table. Ça tombe bien : c’est justement une politique que l’école suit depuis plus de dix ans. Sans se cacher de vouloir faire des économies : depuis 2012, la section ciné réalise moins de documentaires, pour des raisons de coûts. De même, la section son ne va plus à Radio France enregistrer la dramatique radio de 3e année. On remplace tout ça par des cours sur table ou des exercices à domicile, qui coûtent moins cher, tout simplement.
Et puis, s’enchaînent surtout les diatribes contre une direction que les étudiant.e.s présent.e.s jugent «méprisante», «condescendante», «opaque». Celle-ci en retour, se serait insurgée contre des professeurs accusés de manipuler les élèves, et aurait menacé de porter plainte pour diffamation à la suite de la pétition. Les étudiant.e.s, ces jamais contents, auraient une «culture de la contestation», qui ne reposerait sur rien de concret. Un vrai repas de Noël dans la belle-famille…
Et d’ailleurs, ils protestent, ils protestent, mais qu’est-ce qu’ils veulent, ces élèves ? Une professeur qui prend la parole les avertit : «Soyez aussi force de proposition.» Ayez quelque chose à mettre sur la table. Revenir dans les locaux actuels est jugé bien trop cher par l’administration (argument surprenant, le loyer était-il donc tellement plus bas quand ils sont venus ici en 2012 ?) Et les JO imposent un déplacement de toute façon. Au vu des délais, il paraît difficile de trouver une solution, quelle qu’elle soit, qui permette d’éviter que l’opération tourne à un certain chaos. L’après-midi de l’AG a d’ailleurs été consacré à des groupes de travail pour que les élèves mettent au point leurs revendications : qu’espèrent-ils ? Et sur quoi est-ce qu’ils pensent vraiment pouvoir obtenir quelque chose ?
La 2e journée d’Assemblée Générale du mardi 14 février. Étaient présent.e.s des membres de syndicats, de la presse, et d’associations professionnelles dont l’AFSI, l’AOA, et l’AFC dont vous retrouverez ici le communiqué
Money money money ?
Alors, ce cri au loup est-il un bête réflexe, bien ancré dans une tradition de protestation qui serait dans l’ADN de l’école ? Après tout, celle-ci s’est très bien faite aux déménagements précédents, malgré les prophéties répétées qui annonçaient sa mort. Elle a su rebondir et garder ses exigences. Ou fait-on face aujourd’hui à un autre genre de débat ? Sans vouloir entrer dans les luttes de couloirs de l’école ou déterminer qui a tort ou qui a raison, sans non plus dévier vers des sujets distincts comme les nouvelles formations, on est tout de même en droit de s’inquiéter sur les points suivants :
-la prétention à garder un enseignement de même qualité tout en réduisant des deux tiers la surface de l’établissement, par la récupération des locaux qu’une école privée avait jugés peu pratiques, et qui ne comportent qu’un seul plateau de tournage et pas de vraie salle de projection aménagée
-le caractère précipité de la chose : dix mois pour une opération qu’on mettait jusqu’ici trois ans à préparer, ça ressemble furieusement à de l’improvisation. Or ça ne fait jamais que 5 ans qu’on sait que les JO arrivent… La direction a beau vanter à ses étudiant.e.s l’aspect «pédagogique», d’un démontage et d’une ré-installation des équipements à toute allure, les raisons qui l’ont conduite à se décider si tard posent question…
-enfin, le sujet des coûts évoque des problèmes de fond qui devront bien être abordés un jour. Oui, l’école Louis Lumière, l’une des plus anciennes écoles de cinéma au monde, coûte cher. Oui, son enseignement de pointe exige des machines, des matériaux, des espaces qui ne sont pas gratuits. Et oui, les mauvaises langues pointeront que des tas de médecins qui sauvent des vies, des tas d’ingénieurs qui modernisent le pays et même les mécaniciens qui réparent nos chars Leclerc, ont été formés pour bien moins que ça.
On a envie de répondre : et alors ? La culture dans son ensemble coûte cher. L’intermittence aussi coûte cher. Le rayonnement culturel français se mesure mal en termes de rentrées d’argent. Les dizaines de Césars et autres récompenses glanés par les ancien.ne.s de l’école ont du mal à se traduire en monnaie sonnante et trébuchante. Or d’un autre côté, on s’enorgueillit dans les discours de la vitalité de notre cinéma, on applaudit quand un film français décroche un Oscar à Los Angeles, on annonce des investissements colossaux et des appels à projets pour faire de la France «un leader européen des tournages». N’y a-t-il pas une forme de schizophrénie à stigmatiser parallèlement les coûts de formation des futur.e.s technicien.ne.s qui devront justement faire tourner ces nouveaux plateaux, cette nouvelle industrie qu’on veut développer à toute allure ? Alors jusqu’à quel budget max veut-on faire descendre l’école Louis Lumière ? Sous quel seuil est-ce qu’on jugera enfin son enseignement «rentable», et que le contribuable en aura eu pour son argent ?
Dans le film Le Bossu, en 1997, l’aristocrate décadent joué par Fabrice Luchini soupire : «On paye toujours trop quand on paye». On ne peut que souhaiter que telle ne soit pas devenue la maxime de l’administration de l’école. En passant, ce film a obtenu un César pour huit nominations. Le réalisateur s’appelait Philippe de Broca, je ne vous dis pas dans quelle école il avait été formé.
2) Droit de réponse de la direction
Le directeur de l'école a souhaité exercer un droit de réponse. Nous lui accordons bien volontiers :
Démenti du Directeur de l'ENS Louis-Lumière
Dans un article intitulé "Que se passe-t-il à l'école Louis-Lumière", vous reprenez pour argent comptant les informations mensongères d'une pétition issue d’un collectif anonyme d’étudiants et d’enseignants de l’ENS Louis Lumière, qui appelle à s’opposer au prétendu démantèlement de notre l’établissement, qui doit quitter en janvier 2024 la Cité du cinéma. Circulant sur les réseaux sociaux, cette pétition a recueilli des milliers de signatures. Elle témoigne surtout de la contestation permanente entretenue dans notre école par une partie des enseignants, qui sont motivés par des griefs personnels. D'ailleurs, l'auteur de cet article Pierre Bezard est un ancien étudiant de l’ENS Louis Lumière sorti en 2013 et il va de soi qu'il a conservé des liens avec ces enseignants. Ce qui explique qu'il écrive que ma personnalité "cristallise les rancœurs depuis ma prise de fonction". J'aimerais plutôt être factuel.
Le fait est que nous devons quitter en fin d’année la Cité du Cinéma où nous étions installés depuis 2012. En effet, celle-ci a été réquisitionnée pour l’organisation des Jeux Olympiques à partir de début 2024.
Nous avons d’abord envisagé un déménagement temporaire le temps des JO, mais décision a finalement été prise par notre tutelle le ministère de l'Enseignement supérieur de profiter de cette opportunité pour implanter notre école durablement sur un nouveau site, en raison notamment du montant excessif du loyer annuel à la Cité du Cinéma.
Sur notre nouveau lieu d’implantation, le campus Condorcet (près de la station de métro Front Populaire), nous demeurerons dans un environnement de plateaux de cinéma et d’activités professionnelles, tout en étant entourés de grandes écoles et d'universités, ce qui permettra à nos étudiants un accès immédiat à des services essentiels tels que logements, restaurant Crous, services de sport et de santé, qui leur font actuellement défaut.
Le 14 février, pendant deux heures et demi, j'ai repris un à un les arguments fantaisistes de cette pétition devant nos étudiants, en présence de Pierre Bezard qui était apparemment sur les lieux - à moins qu'il ne soit parti quand j'ai pris la parole ? [1] Il aurait pu en rendre compte... J'ai notamment démenti le fait que nous allions mettre en place des masters payants, et développer les formations courtes au détriment des cursus existants. Nous avons simplement l’objectif de développer des formations par apprentissage, et nous avons déposé un projet de master payant en association avec l’école Polytechnique, à destination d’étudiants étrangers, dans le cadre de l'appel à projets France 2030. Ce master, s’il voit le jour, ne figurerait pas dans notre offre de formation.
D’autres imprécisions notables méritent d’être corrigées, à commencer par les superficies annoncées. Notre bâtiment actuel ne mesure par 7 700m2 mais 7 128m2, et nos futurs locaux ne mesureront pas 2 500m2, mais plus de 5 500m2. Aujourd’hui nous payons pour ces 7128 m2 chaque année 3 325 000 TTC. Demain sur le Campus Condorcet, pour 5530 m2, nous paierons 1 486 000 TTC. Il se trouve que juste à côté de chez nous, à Paris 8, les étudiants travaillent dans des locaux très dégradés. Je trouve normal de mieux repartir l'effort financier et patrimonial dans l'Enseignement supérieur entre grandes écoles et universités.
Sur le nouveau site, les équipements, les investissements et les moyens seront maintenus à l’identique et possiblement développés, pour que les étudiants des trois masters cinéma, photo et son continuent de travailler dans les meilleures conditions. Certes ce nouvel environnement va déterminer une nouvelle organisation, mais cette école bientôt centenaire, va pouvoir ainsi parachever sa transformation en établissement d'enseignement supérieur et continuer d’assurer sa mission de service public.
Vincent Lowy
- [1] Pierre Bézard était présent sur place le 13 février et non pas le 14. Note de l'AFSI.
3) Droit de réponse de l’intersyndicale de l’ENS-Louis-Lumière
Nous publions également ci-dessous un droit de réponse demandé par l'intersyndicale enseignants et étudiants CGT FERCSup - FOESR - SNESUP-FSU - SUP Recherche - SUD Education - UNEF Louis-Lumière. Les parties en gras sont des auteurs :
ENS Louis-Lumière : rétablissons la vérité.
« Halte à la désinformation » est le slogan utilisé par la direction pour décrédibiliser la pétition lancée par un groupe d’étudiant•e•s et d’enseignant•e•s.
Or, il s’agit bien de l’enjeu essentiel de la pétition : informer et alerter sur la réalité des faits et des projets en cours à partir d’éléments factuels. Les arguments avancés dans la pétition sont étayés (contrairement au qualificatif « fantaisiste »)
Notre démarche procède d’une vive inquiétude face aux informations contradictoires et improvisées. Le démenti de notre direction ne répond pas à notre besoin de réponses claires. Il confirme à la fois nos craintes pour l’avenir de l’école et la volonté de stigmatiser le corps enseignant et d'infantiliser les étudiant•e•s.
A propos des superficies et des coûts : Le bail signé par l’école indique que « la surface retenue pour la facturation des loyers des locaux est de 7 736 m2 de « surface utile » (p.5), chiffrage repris dans l’arrêt n°213-742 de la Cour de discipline budgétaire et financière de la Cour des comptes.
Le chiffre d' « environ 7 128 m2 » est mentionné dans une étude réalisée par une société de conseil (octobre 2020). Quant à l’échéance du bail, parlons-en : annoncée pour 2021, puis pour 2024, elle est en réalité fixée à novembre 2027.
Les 13 et 14 février, grâce aux AG organisées par les étudiant•e•s, une visite des locaux a été enfin possible. Vendredi 17 février, miracle : un nouveau bâtiment viendrait s’ajouter aux autres, mais ne sera disponible qu’ultérieurement. Ce qui permettrait d’afficher dorénavant 5732 m2 (le montant annuel du loyer déclaré par la Direction à hauteur de 1,904 million TTC comprend-il les charges ?).
Comment ne pas s’inquiéter, d’autant que ce 21 février, une nouvelle décision est prise par le chef d'établissement et le Ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche : en 2033, l'école sera ré-installée sur un site unique et domanial sur le Campus de la Cité Descartes à Champs-sur-Marne. Le déménagement définitif est donc redevenu provisoire.
L’urgence et le retard de réflexion pris à ce stade posent réellement la question de la maîtrise d’un dossier aussi important et de son corollaire, la faisabilité et la qualité des installations techniques qui devront être reconstruites dans le(s) futur(s) lieu(x) d’accueil. D’ailleurs, que deviendront les installations actuelles à la Cité du Cinéma (2 plateaux, post-production film, studios de mixage et enregistrement, studios de prise de vues et laboratoires photo, salle de cinéma, etc.) ? Et celles provisoires en attendant celles définitives de 2033 ?
A propos des formations payantes, après les chiffres, il s’agit de jouer avec les mots. Sans concertation avec les enseignant•e•s, la direction de l’ENS Louis-Lumière a bien déposé un projet pour La Fabrique de l’image-France 2030, dans lequel le Master of Science and Technology figure expressément, en partenariat avec l’école Polytechnique, Telecom et Telecom Sud Paris, formation majoritairement en anglais, gratuite pour certain•e•s étudiant•e•s français•e•s ou payante (16000 euros) pour les étudiant•e•s étranger•e•s, ou bien encore à tarif préférentiel pour les étudiant•e•s des écoles partenaires publiques et privées. Ce master qui délivrerait un joint diploma, figurerait donc bien dans l’offre de formation de l’ENS Louis-Lumière.
• Quant au développement de « formations courtes, dans une lettre signée par le directeur et diffusée largement par lui-même, tant aux personnels de l’école qu’à un public extérieur, on peut lire :
"L’école doit retrouver ce qui d’une certaine façon faisait le succès des cours du soir il y a trente ans et qui a été abandonné : des formations courtes, mais qualitatives permettant de pourvoir rapidement à des besoins importants". (12 octobre 2022).
La méconnaissance des contenus et niveaux pédagogiques par la Direction se traduit par la confusion entre cours du soir (formations diplômantes de longue durée en horaires décalés mais de même niveau que les cours "de jour") et formations courtes (séquences à durée et niveau scolaire plus limités, pas forcément diplômantes). Or notre mission de service public passe par la qualité et les modalités de nos formations, mais également par la coopération entre écoles et universités. Non seulement ces dernières sont ignorées dans les projets France 2030, mais de plus des conventions de partenariat permettant la coopération entre les étudiant•e•s de l’école et les étudiant•e•s d’autres formations ont été annulées cette année par la direction sous prétexte d’incompatibilités ou d’autres priorités.
Quel rôle pour les équipes pédagogiques ?
Le conseiller de site du Ministère (8 décembre 2022) a assuré les personnels sur le calendrier pour le déménagement et le rattachement à un Établissement Public Expérimental (EPE) ainsi que sur le principe d’un « travail collectif qui repose aussi sur les équipes pédagogiques ». Or les instances et les équipes pédagogiques n’ont pas eu leur mot à dire ni sur le déménagement provisoire, ni sur celui définitif en 2033, ni sur le choix des lieux, ni sur l’université à laquelle sera rattachée l’école. Elles ont été tout juste informées une fois les décisions prises ou encore grâce aux AG organisées par les étudiant•e•s les 13 et 14 février.
En conclusion
Est-ce ainsi que l’ENS Louis-Lumière parachèvera « sa transformation en établissement d’enseignement supérieur » et assurera « sa mission de service public » : avec un écartèlement de site et de cursus, un Master payant pour les étudiant•e•s étranger•e•s, des fins de non recevoir, les cours du soir, le non-respect des instances et des équipes pédagogiques !
Faute d’anticipation depuis 2017, il faut désormais, dans l’urgence absolue, trouver des solutions et dans la foulée effectuer les travaux nécessaires. L’enjeu pédagogique est de préserver la continuité et la cohésion des cursus pour les promotions en cours et celle qui arrivera début septembre 2023, de mener une recherche à la hauteur des objectifs et ambitions de notre école et de l’Université de rattachement, et enfin de préparer le nouveau déménagement de 2033.
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